Tu institueras des juges et des policiers
Tu institueras des juges et des policiers dans toutes les villes que l’Eternel, ton Dieu, te donnera, dans chacune de tes tribus, et ils devront juger le peuple selon la justice (Deutéronome 16:18). Le juge et le policier remplissent des fonctions différentes; le policier doit veiller au respect de la loi et à l’ordre public; il présente devant le juge celui qui a transgressé la loi et le juge prononce le verdict. Toutefois, le verset nous apprend que le policier doit aussi remplir les fonctions de juge; en effet, la partie du verset: et ils devront juger le peuple... se rapporte à eux deux... Le policier ne doit pas avoir deux poids et deux mesures: il doit apprendre l’équité du juge.
La Torah se sert du pluriel: juges et policiers et passe après au singulier: Tu institueras, puis revient au pluriel et ils devront juger. Elle parle d’abord aux juges et aux policiers, et leur explique qu’au-dessus d’eux il y a un autre juge et magistrat: l’Eternel, comme il est écrit: Dieu est un juge équitable (Psaumes 7:12). Le Tribunal Céleste les juge à leur tour: Sache qu’il y a au-dessus de toi un oeil qui voit tout, une oreille qui entend tout, et toutes tes actions sont inscrites dans le livre (Avoth 2:1). Des juges et des magistrats célestes (au pluriel) te regardent: Ne fais donc pas fléchir le droit. Et si le juge rend un jugement défectueux, son châtiment est sévère. Ce n’est que quand lui et le policier chargé de l’ordre public prendront conscience de ce fait qu’ils pourront rendre une justice équitable. Le juge doit être son propre policier et se juger quand il rend justice. Il doit veiller à ce qu’on ne craigne pas de lui faire des remarques au cours du procès.
La Guémara relate à ce sujet l’épisode de Rabbi Yanaï qui avait un arbre qui tendait vers le domaine public. C’est ce qui se passait aussi chez un autre habitant de la ville. Comme cet arbre dérangeait la circulation, les voisins de ce dernier vinrent chez Rabbi Yanaï pour qu’il lui demande de le faire couper. Revenez demain! leur dit-il. La nuit, Rabbi Yanaï envoya un de ses serviteurs couper la partie gênante de son propre arbre. A leur retour le lendemain chez lui, Rabbi Yanaï leur demanda de couper l’arbre. Mais votre arbre aussi tend vers le domaine public! lui fit remarquer notre homme. Allez voir: si le mien est coupé, coupez le vôtre aussi lui dit-il (cf. Bava Bathra 60b).
Rabbi Yanaï ne s’était-il pas rendu compte que son arbre dérangeait le passage? Pourquoi a-t-il demandé à son serviteur de couper son arbre avant qu’il l’ordonne à l’autre! C’est que même un grand Tsadik est susceptible d’oublier ou de se tromper. Il considérait que les branches de l’arbre étaient très utiles pour les passants dans ce sens qu’elles leur offraient de l’ombre. Ce n’est que lorsqu’il a vu que les voisins ne voulaient pas lui dire la vérité parce qu’ils avaient honte de lui, qu’il a demandé à son serviteur de couper les branches de son arbre qui dépassaient, comme le demande la Halakhah. Le Tsadik aussi peut donc se tromper...
Dans tout ce que tu fais, choisis des juges et des magistrats comme arbitres. Prends toi-même particulièrement garde. Et même si, comme dans l’épisode de Rabbi Yanaï, les gens avaient beaucoup de respect pour lui, il a compris qu’il devait donner l’exemple et agir en conséquence.
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