Le peuple affecta de se plaindre...

Le peuple affecta de se plaindre amèrement aux oreilles du Seigneur (Nombres 11:1). Plaintes vraiment étranges! Qu'ont-ils trouvé de mal dans la manne, cette nourriture céleste, que même les anges consomment (Yoma 75a), comme il est écrit: Tous eurent à manger de ce pain de délice (Psaumes 78:25). Chacun y trouvait le goût qu'il voulait (Yoma ibid.). Des pierres précieuses et des perles tombaient avec elle... Pourquoi donc le peuple préférait-il de la viande et toutes sortes de plats ordinaires dénués de toute ségoulah?

Il nous souvient du poisson que nous mangions pour rien en Egypte (ibid. 11:5): comme si en Egypte les enfants d'Israël étaient un peuple libre et qu'aucune besogne dure ne pesait sur leurs épaules! Il ne leur manquait que manger à satiété de la viande! Or nous savons que ce n'était pas du tout le cas: les enfants d'Israël ont mené une vie d'asservissement en Egypte, comme il est écrit: Les Egyptiens accablèrent les enfants d'Israël de rudes besognes (Exode 1:13). On ne leur servait certainement pas le menu riche qu'ils mentionnent dans notre sidrah. Que voulaient-ils alors dire exactement par Il nous souvient du poisson?

Nos Sages enseignent à cet effet que chez les Tsadikim, la manne descendait à la porte de leur maison; les gens moyens sortaient et en ramassaient, et les méchants se dipersaient pour la recueillir (Yoma 75a). Comme ces derniers avaient honte que tout le monde remarquait leur défaillance et leur mauvaise conduite, ils se plaignirent à Moché et exigèrent une nourriture ordinaire... afin que personne ne se rendît compte de leur mauvaise conduite.

N'oublions pas que cette génération de la Connaissance était constamment entourée d'une nuée de Gloire. Elle assistait quotidiennement à des miracles et des prodiges et ressentait la Présence Divine dans le désert. Toutefois, ce qui dérangeait certains, c'est que les autres ressentent que dans leur for intérieur ils sont encore des méchants, et au lieu de se repentir, ils se sont plaints de la distribution de la manne et accentué leur méchanceté vis-à-vis de la Chékhinah.

Le Saint, béni soit-Il, a donc dû laisser les enfants d'Israël quarante ans dans le désert, comme il est écrit: autant de jours, autant d'années, vous porterez la peine de vos crimes (Nombres 14:34). C'est parce que les enfants d'Israël avaient la nuque raide et comme Dieu prévoyait que les explorateurs parleraient du mal d'Erets Israël et en seraient châtiés, Il les a laissés dans le désert pour qu'ils raffermissent leur foi en Lui. La manne les réveillait tous les matins  à prendre le bon chemin en leur rappelant leur péché qu'ils devaient expier. Mais leur rectification n'était pas complète et ils ont continué à se plaindre. Qu'en serait-il alors à leur entrée en Israël, où la manne ne tombe pas pour leur rappeler leur situation au plan spirituel et où il leur serait alors certainement difficile de se repentir?

Le Saint, béni soit-Il, voulait donc qu'ils soient doués de bons traits et s'engagent dans l'étude de la Torah. La foi aux préceptes divins leur serait alors chose facile, car celui qui s'attache à la Torah, se contente de peu pour subsister au plan matériel, aspect de: Quand même tu serais réduit à ne manger que du pain avec du sel (Pirké Avoth 6:4), et ne pense pas à la caille et aux poissons. Et s'ils en exigeaient davantage du Ciel, c'est qu'ils ne s'étaient certainement pas assez attachés à la Torah.

Il nous souvient du poisson que nous mangions en Egypte (Nombres 11:5) se plaignirent-ils, alors qu'en Egypte ils n'étaient que des esclaves, et l'ail, les oignons, les concombres, etc. n'entraient assurément pas dans leur menu quotidien dans le désert. Les Egyptiens ne leur donnaient certainement pas des poissons pour rien: même la paille, le Pharaon refusait de leur donner (cf. Exode 5:18; Rachi et Sifri ibid.). Pour rien, signifie d'ailleurs sans accomplissement de mitsvoth (en retour). Les enfants d'Israël se sont en somme souvenus du poisson qu'il ont vu sans jamais avoir pu en manger durant leur asservissement en Egypte.

On aurait pu à la rigueur comprendre qu'ils désiraient quelque chose qu'ils avaient déjà goûtée et mangée et qu'il leur était difficile de s'en séparer. Les enfants d'Israël ont au contraire convoité quelque chose qu'ils n'ont jamais mangée de leur vie. Ils l'ont préférée à la manne, qui était une nourriture spirituelle et qui avait tous les goûts, comme nous l'avons vu plus haut.

C'est qu'on peut dire qu'il n'a pas été donné à chacun de trouver dans la manne le goût qu'il voulait. Les méchants, qui n'avaient aucun mérite, n'y ont trouvé aucun goût. Ce serait peut-être la signification de l'enseignement de nos Sages selon lequel la manne avait le goût du pain pour les Justes, celui de gâteaux pour les moyens, quant aux méchants, ils devaient l'écraser sous la meule ou la pilaient au mortier (Yoma 75a): c'est pourquoi ils ont préféré la caille à la manne, où ils n'ont pas trouvé le goût qu'ils voulaient et qui a engendré la honte de voir que tout le monde comprenait que c'étaient des méchants.

La manne visait par conséquent à guider et éveiller les enfants d'Israël. Grâce à elle, tout le monde pouvait estimer son degré d'étude de la Torah et sa crainte du Ciel. Et si quelqu'un voyait que son niveau spirituel n'était pas élevé, il s'efforçait d'accéder à la plénitude, à la cinquantième porte de la pureté. La manne permet d'accéder à la reconnaissance du Créateur, comme il est écrit: Au matin, vous vous rassasierez de pain et vous reconnaîtrez que moi, l'Eternel, Je suis votre Dieu ( Exode 16:12). D'ailleurs, les lettres de MaNne font allusion aux Mem quarante jours à l'issue desquels la Torah a été donnée (Ména'hoth 99b). L'homme possède donc les forces et les moyens d'acquérir la Torah et la crainte du Ciel. Quant à la lettre Noun (50), elle fait allusion aux cinquante Portes de la pureté: par conséquent, celui qui s'engage dans l'étude de la Torah peut accéder à la plénitude. Et si les MiToNeNiM plaignants, s'étaient repentis, ils se seraient élevés au plan spirituel. Le terme MiToNéNiM ayant la même valeur numérique (597) que VaYaMTeR 'ALéIHeM MaN LéEKhOL, Il fit pleuvoir sur eux de la manne comme nourriture (Psaumes 78:24).

Les enfants d'Israël ont donc commis une double faute: la première, au lieu de se réjouir de la manne et d'exploiter ses vertus spirituelles, ils ont demandé une nourriture physique pour que les autres ne prennent pas conscience de leur bas niveau. Le Saint, béni soit-Il, les a châtiés mesure pour mesure, comme il est écrit: La chair était encore entre leurs dents... lorsque la colère du Seigneur éclata contre le peuple, et le Seigneur frappa le peuple d'une mortalité très considérable (Nombres 33:12). Notons d'ailleurs à cet effet la similitude des valeurs numériques respectives de MiToNéNiM et BéMiDaH CHéADaM MoDeD BaH MoDéDiM LO, On mesure à l'homme selon ce qu'il a mesuré (Méguilah 12b; Sotah 8b) (597).

La deuxième faute que les plaignants ont commise était qu'ils n'ont pas pris en considération ceux qui aspiraient à s'élever dans les voies de Dieu et de jauger leur service divin... Il est vraiment difficile de concevoir comment ils ont visé à tromper leur Créateur, eux qui ont vu quotidiennement des miracles dans le désert... Le Talmud enseigne à cet effet: A celui qui pèche et fait pécher les autres, on ne lui donne pas l'occasion de se repentir (Sanhédrine 107b; Avoth DéRabbi Nathan 40:3). Grande est la faute de celui qui ne veut pas exploiter les bienfaits de Dieu et empêche les autres d'en jouir.

C'est que les mauvais traits, dont les enfants d'Israël se sont imprégnés durant leur servitude en Egypte, étaient encore ancrés en eux. Et même les 49 jours que Dieu leur a donnés pour se laver de toute souillure ne leur ont pas suffi pour déraciner tout à fait le mal: toute la génération du désert a donc péri.

Le Gaon de Vilna explique à cet effet que celui qui ne s'engage pas intensivement dans l'étude de la Torah ne se laisse pas impressionner par les miracles auxquels il assiste. Ils ne sont pas en mesure de lui faire emprunter le bon chemin et c'est la raison pour laquelle les enfants d'Israël sont descendus à un niveau si bas en dépit de tous les prodiges qui ont été accomplis pour eux. Le verset dit à cet effet: Voici, Moi-même, Je t'apparaîtrai dans un épais nuage, afin que le peuple entende que c'est Moi qui te parle, et qu'en toi aussi ils aient foi constamment (Exode 19:9). Or, nous savons que le peuple tout entier répondit d'une voix unanime: Tout ce que dit l'Eternel, nous le ferons (ibid. 19:8): les enfants d'Israël avaient donc d'ores et déjà accédé à la foi: Pourquoi donc le verset parle au futur, Yaaminou (il croiront). Nous voyons donc que ce n'est qu'après la réception de la Torah, lorsqu'ils étudieront la Torah intensivement  que la foi s'ancrera dans leur cœur. Si leur foi était auparavant éphémère, elle devint maintenant éternelle.

Si les enfants d'Israël ont commis le péché du veau d'or, c'est parce qu'ils ne se sont peut-être pas assez engagés dans l'étude de la Torah: la foi ne les a donc pas encore complètement imprégnés. Et lorsqu'ils se sont impatientés et ont proclamé: puisque celui-ci, Moïse, qui nous a fait sortir du pays d'Egypte, nous ne savons pas ce qu'il est devenu (Exode 32:1), ils ont montré que le doute habitait encore leur cœur: c'est la raison pour laquelle ils ont péché.

Toutefois, quand les enfants d'Israël ont reçu la Torah, le mauvais penchant s'est déraciné de leur cœur, comme nous l'avons vu. Nous avons bien dit de leur cœur, mais il sévissait encore dans le monde. Les enfants d'Israël ont volontiers porté sur eux le joug de la Torah et des mitsvoth, mais ils attendaient que Moché descende du Ciel pour la leur enseigner. Le rôle essentiel qu'il leur incombait de jouer: s'engager dans l'étude de la Torah, commençait alors... Le mauvais penchant aurait disparu de la terre, ils seraient entrés en Terre Sainte, et le Saint Temple n'aurait jamais été détruit.

Malheureusement, à cause de nos péchés, le mauvais penchant continuait de tourner de par le monde et d'attendre l'occasion de revenir: c'est ce qui s'est passé quand ils ont un instant négligé l'accomplissement du nombre restreint de mitsvoth qu'ils avaient reçues. Le mauvais penchant est alors une fois de plus entré en scène et les a incité à faire le veau d'or.

Le peuple qui affecta de se plaindre n'a pas été assez intelligent de tirer la leçon de ceux qui ont négligé l'étude de la Torah et commis ce péché grave. Les enfants d'Israël ont au contraire continué d'emprunter le chemin du péché. Ils se sont plaint, ont demandé une nourriture terrestre et ont refusé de consommer la manne, cette nourriture spirituelle qui les aurait certainement fait reprendre la voie de l'intégrité et leur éviter la honte... Ils ont alors été châtiés comme ils le méritaient.

Veuille l'Eternel nous aider à voir au plus tôt le bien caché BaTOuV HaGaNOuZ dont la valeur numérique (90) est similaire à celle du terme MaNne. Puissions-nous assister à la consolation de Tsion et à la reconstruction de Jérusalem, au plus vite et de nos jours. Amen!

 

 

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