L’amour de D. pour l’homme créé à Son image

Il est écrit (Béréshit 1:27): « Et D. créa l’Homme à Son image, à la ressemblance de D. Il le créa... » et la Mishna (Avot III:14) commente: « L’homme, qui a été créé à l’image de D., est aimé de Lui ». L’image de D. en l’Homme lui permet de servir son Créateur et d’avoir connaissance de D., chaque homme selon son intelligence et ses capacités, comme le dit le Rambam dans son Livre de la Connaissance (Yessodey HaTorah 2:2). C’est par sa bonne conduite que l’homme manifeste l’image de D. qui est en lui. Cela demande beaucoup de travail sur soi et de grands efforts, car il nous faut corriger nos actes et acquérir des valeurs et des qualités morales assez élevées pour nous permettre de discerner l’image de D. et de sentir la réalité de D., béni soit-Il. Nous devons prendre l’habitude d’agir correctement dans tout ce que nous faisons, en particulier dans les synagogues ou les maisons d’étude qui sont spécialement sanctifiées par la Présence de D. (Brach’ot 6a), comme il est écrit: « D. se tient dans l’assemblée qui porte Son Nom » (Téhilim 82:1). C’est dire que dans une telle assemblée plus qu’en tout autre lieu, nous pouvons sentir la proximité de D. et ressentir vivement la crainte de Lui, de Sa splendeur, de Sa puissance, comme il est dit: « Sache devant Qui tu te tiens » (Derech’ Eretz Rabba fin du Ch. 3). C’est seulement lorsque l’on connaît et que l’on est conscient de l’image de D. qui est en l’homme, que l’on peut savoir devant Qui on se tient - devant le Roi des rois, béni soit-Il. Par contre, si l’on ne distingue pas et ne voit pas clairement l’image de D. qui est en l’homme, cette image et cette ressemblance s’effacent (voir Béréshit 1:26), et alors on ne peut ni savoir ni comprendre que l’existence de D. est manifeste en tout lieu.

Si l’homme doit préserver l’image de D. qui est en lui, il s’ensuit qu’il doit préserver cette image en son prochain, qui lui aussi est créé à l’image de D., et c’est pourquoi chacun doit respecter son prochain, comme il nous est enseigné: « L’honneur de ton prochain doit t’être aussi cher que ton propre honneur » (Avot II 13). Il est dit précisément « ton propre » honneur: de même que tu veilles à l’image de D. en toi, ainsi tu dois veiller et préserver l’image de D. en ton prochain.

En commettant une faute envers notre prochain, nous commettons une faute envers D. Notre prochain aussi est créé à l’image de D. et insulter son prochain est une insulte envers D.  Pourtant, celui qui transgresse un de ses devoirs envers D. n’est pas comparable à celui qui faute dans ses rapports avec son prochain, car vis-à-vis de son prochain, il a fauté à la fois envers D. et envers son prochain, c’est pourquoi il nous est enseigné (Yoma 85a) que si le repentir ou les souffrances procurent le pardon pour les fautes commises envers D. (voir ibid. 85a-b et 86a), les fautes commises envers son prochain ne sont pardonnées que si l’on a apaisé son prochain. C’est seulement après que nous avons rendu au prochain l’image de D. qui est en lui, que notre repentir est accepté et que nous obtenons le pardon de la faute commise envers lui. C’est pourquoi il faut désirer le bien de son prochain au point de sentir et de distinguer à nouveau en lui l’image de D. à laquelle nous avons porté atteinte en fautant contre lui. Alors les choses rentrent dans l’ordre. C’est à ce sujet que Rabbi Akiva a dit, concernant le verset (Vayikra 19:18): « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », que « c’est un principe fondamental de la Torah » (Yéroushalmi Nédarim 9:4), car si quelqu’un porte atteinte, D. nous en préserve, à l’honneur de son prochain, c’est comme s’il niait l’existence de Celui qui a donné la Torah et l’existence même de D.  Aimer son prochain comme soi-même est un principe fondamental de la Torah, délice permanent de D.

A propos de Avraham Avinou, il est dit que le jour où il s’est circoncis et qu’il a obéi à la Parole divine, il est devenu parfait, et par là porteur de la Présence divine. Au troisième jour après sa circoncision, il est écrit (Béréshit 18:1): « L’Eternel Se révéla à lui dans les plaines de Mamré... » et Rashi rapporte le commentaire des Sages (Babba Metzya 86b): « C’était le troisième jour après la circoncision, et D. vit combien Avraham regrettait qu’il n’y ait aucun passant à accueillir dans sa maison. C’est que D. avait causé une chaleur torride afin qu’Avraham ne soit pas dérangé par des visiteurs ». Mais Avraham en fut peiné et il envoya son serviteur Eliézer chercher des invités (ibid.). Tant et si bien que D. eut compassion de lui et lui envoya trois anges, Michaël, Gabriël et Raphaël, sous forme de trois Arabes (Béréshit Rabba 48:9). Avraham fut rempli de bonheur de pouvoir accueillir des hôtes et pour ce faire, il demanda à D. (Béréshit 18:3): « De grâce, ne quitte pas Ton serviteur » et (ibid. verset 2): « il courut à eux du seuil de la tente ». Cela nous montre qu’Avraham se retire de devant la Présence de D. pour accourir vers les visiteurs, de façon telle que les Sages (Shabbat 127a) en tirent l’enseignement selon lequel « accueillir des invités est plus important qu’aller au devant de la Présence divine ».

C’est une chose très surprenante et qui demande à être expliquée.

1. L’absence d’invités cause à Avraham une peine plus grande que la douleur qu’il ressent à cause de la circoncision et cela au troisième jour - au moment où la faiblesse est la plus grande! (Voir Shabbat 134b, et le commentaire de Rabbeinou Nissim, Nédarim 31b).

2. Avraham se trouvait en Présence de D. qui était venu le visiter pour lui apporter la guérison, et malgré cela, il regrette de n’avoir aucun visiteur. זtre en Présence de D. serait donc sans importance?

3. Dès que des visiteurs viennent, Avraham quitte la Présence de D. et accourt à leur rencontre. Convient-il d’agir ainsi vis-à-vis de D.? C’est une chose étonnante! Et qu’est-ce qui permet aux Sages d’affirmer que recevoir des visiteurs est plus important qu’être en Présence de D.? Qu’est-ce qui nous permet de dire qu’Avraham a agi correctement lorsqu’il s’est retiré de devant la Présence divine?

4. Pourquoi Avraham a-t-il tant de peine de ne pas avoir de visiteurs, et pourquoi désire-t-il tellement accueillir des visiteurs dans sa maison?

5. Qu’y a-t-il d’exceptionnel dans le fait que, après la circoncision, lorsqu’il devient parfait, il désire tant que des passants lui rendent visite? Pourquoi justement à ce moment-là?

Nous allons tenter, avec l’aide de D., d’expliquer clairement chacun de ces points.

Avraham avait un grand amour de toutes les créatures. Il n’a jamais considéré leur apparence extérieure, au contraire il ne voyait et ne ressentait que leur intériorité, leur essence, ce qui est caché en eux. Comme nous l’avons vu plus haut, chaque homme est créé à l’image de D. et c’est cela qui doit être manifeste. Le rôle d’Avraham en ce monde est de prouver aux hommes que leur mode de vie est un échec et de les convaincre de leurs erreurs afin de les amener à la connaissance de D. et à la confiance en Sa Providence, comme disent les Sages à propos du verset « Et les âmes qu’ils ont acquises à H’aran » (Béréshit 12:5): « Avraham convertissait les hommes » (Béréshit Rabba 39:21). C’est aussi ce qu’Avraham dit à Eliézer son serviteur (ibid. 24:3): « L’Eternel D. du ciel et de la terre... », ce que Rashi, rapportant le commentaire de nos Sages, explique ainsi: « Jusqu’alors, Il n’était que D. du Ciel, mais depuis que j’ai enseigné et habitué les gens à proclamer Son Nom, Il est aussi D. de la terre ». Avraham fait sentir aux hommes que l’image de D. dont ils étaient porteurs les avait quittés, et à partir de ce moment-là ils l’ont retrouvée - grâce à son enseignement.

A partir du moment où Avraham fut circoncis, il devint parfait et porteur de la Présence de D.  Justement à ce moment-là Avraham désire le plus ressembler à D. en tout, il veut être à Son image et à Sa ressemblance, comme il est écrit « Attache-toi à Ses voies et à Ses qualités: de même qu’Il est miséricordieux, sois miséricordieux, de même qu’Il est bienfaisant, sois bienfaisant... (Sotah 14a entre autres). C’est pourquoi en devenant partenaire de D., Avraham ressent une grande peine de ne pas avoir de visiteurs envers lesquels il pourrait être généreux comme D. est généreux, et c’est la raison pour laquelle D. lui envoie trois personnages, afin de lui permettre de les recevoir. En voyant les visiteurs, Avraham quitte la Présence de D. et court à leur rencontre, pour deux raisons: premièrement pour ressembler au Créateur et faire un acte de bienfaisance, deuxièmement, parce qu’il a reconnu en eux l’image de D., comme il la voyait en toute personne.

Dorénavant, chacune des  questions posées s’explique et prend sa place. La peine ressentie par Avraham parce qu’il n’avait pas de visiteurs est plus grande que la douleur de la circoncision, car il ne désire que rapprocher les hommes de leur Créateur et les amener à Lui ressembler. Ce désir est si ardent qu’il en oublie la douleur de la circoncision. Et cela, justement au moment où il s’est circoncis et est devenu parfait dans le sens où il peut maintenant être porteur de la Présence divine, car c’est à ce moment-là qu’il devient partenaire de son Créateur, à Son image et à Sa ressemblance. C’est la raison pour laquelle, bien qu’il se soit trouvé en Présence de D., il regrettait de n’avoir pas de visiteurs, car être en Présence de D. n’est le but de la perfection que si l’on agit avec bienfaisance pour amener les gens à s’en remettre à la Protection divine.

Nous comprenons à présent pourquoi Avraham se retire de devant D. et court vers les visiteurs. C’est qu’en eux aussi, il reconnaît la Présence divine et l’image de D. et donc il s’empresse vers la Présence divine qui se trouve avec les invités, et c’est dans ce sens qu’accueillir des invités représente un acte plus important qu’accueillir la Présence divine, puisque recevoir des invités c’est aussi recevoir la Présence Divine. Et donc Avraham n’a pas porté atteinte à l’honneur de D. en se retirant pour courir accueillir des hôtes de passage, mais il n’a fait que manifester envers eux une générosité comparable à celle du Créateur dont il a suivi Les voies. C’est par de tels actes que la Présence de D. ne nous quitte jamais.

La sainte obligation de tout Juif, descendant d’Avraham, est de se conduire comme lui afin de révéler la Présence Divine, de ramener les hommes à D. et de restaurer en eux l’image de D. qu’ils ont perdue à cause de leurs fautes, non seulement ceux qui ont simplement commis une faute, mais aussi ceux qui ont perpétré de grands péchés, et de les ramener à D.

Les Sages ont dit (Avot V:18): « Quiconque fait acquérir du mérite à la collectivité est assuré de ne commettre aucune faute ». Pour quelle raison? Celui qui dote la collectivité de mérite, comme l’a fait Avraham, agit à l’image et à la ressemblance de D. Quelqu’un qui agit de la sorte pourrait-il avoir dans le cœur un sentiment qui porterait atteinte à la Présence Divine et l’amènerait à fauter? La crainte de D. seule l’empêche de commettre une faute, et une telle personne peut faire acquérir à tous du mérite puisqu’il réalise en lui-même l’image de D. et la distingue aussi chez les autres, qu’il respecte, qu’il ramène à D. et qu’il renforce dans leur foi. Comment reconnaître l’image de D.? Il faut faire beaucoup d’efforts avant de pouvoir la ressentir et parvenir à de grandes réussites, en faveur de soi et en faveur des autres.

Cela nous permet de comprendre ce qui est dit à propos de Moshé Rabbeinou. Il est écrit (Shemot 2:11): « En ce temps-là, alors que Moshé avait grandi, il sortit vers ses frères et il vit leurs souffrances... » C’est-à-dire que Moshé a vu combien ses frères souffraient, il a ressenti leur douleur et leur souffrance dans sa propre chair, c’est pourquoi il est dit « Moshé avait grandi ». A partir de ce moment-là, il a eu le mérite de plaider en faveur de son peuple et d’être l’envoyé de D. pour sauver Israël, parce qu’il a vu leurs souffrances (voir Shemot Rabba 1:27), les a ressenties et partagées. Ensuite, il est écrit: « et il vit qu’un homme égyptien frappait un Juif, un de ses frères, et il tourna son regard à droite et à gauche, et voyant qu’il n’y avait personne, il frappa l’Egyptien à mort... » Rashi rapporte le commentaire des Sages (Shemot Rabba 1:30): « Il l’a tué en prononçant le Nom de D. (Voir Rashi ibid. sur le verset 14).

Il faut expliquer comment Moshé, qui était un prince de la maison de Pharaon, connaissait le Nom de D. Comment l’avait-il appris?

C’est que Moshé avait fait beaucoup d’efforts pour perfectionner ses qualités jusqu’à reconnaître en lui-même l’image et la ressemblance de D.  Lorsqu’il vit l’Egyptien frapper un Juif, il ressentit une grande douleur du fait qu’un Juif, porteur de l’image de D., était frappé si injustement. Et D., comprenant le fond du cœur et de la pensée de Moshé et voyant sa douleur, lui insuffla l’esprit divin, et c’est ainsi qu’il eut connaissance du Nom de D. qui lui permit de tuer l’Egyptien.

La grandeur de Moshé était d’avoir ressenti en lui l’image de D. et de l’avoir reconnue en chaque Juif, ce qui nous permet de comprendre clairement le sens du Midrash (ibid. 13): « Il sortit le jour suivant, et voici que deux Hébreux se dressent l’un contre l’autre, et il dit au coupable: Pourquoi frappes-tu ton prochain? » Moshé dit à l’un d’eux: Ne vois-tu pas en ton prochain l’image et la ressemblance de D.? Pourquoi le frappes-tu? Car il est comme toi, créé à l’image de D. et tu portes atteinte à l’honneur de D. et à la Présence Divine qui est sur ton frère...

Moshé dit par la suite (ibid. 14): « C’est donc une chose connue... » dont le sens est, d’après le Midrash (Shemot Rabba 1:30) cité par Rashi: « Je comprends maintenant à cause de quelle faute Israël, d’entre tous les peuples, est cruellement asservi: ils le méritent, car il y a parmi eux des dénonciateurs et des calomniateurs ». Moshé pense que l’exil se prolonge parce que les tribus d’Israël ne se sont pas encore corrigées de leurs fautes, n’ont pas encore réalisé leur sainteté, à cause de la vente de Yossef, et que tant qu’ils ne sont pas unis, ils ne peuvent pas être sauvés. Nous savons que la calomnie a causé la destruction du Temple (voir Yoma 9b) bien que cette génération ait compté de grands Sages. Nous savons (Yéroushalmi 1:1, Vayikra 26:2) que « les soldats du roi David tombaient au combat et étaient vaincus parce qu’il y avait parmi eux des médisants; par contre les soldats du roi Ach’av, malgré leurs crimes, partaient en guerre et triomphaient de leurs ennemis, parce qu’il n’y avait parmi eux ni calomniateurs ni médisants ».

Chacun doit reconnaître l’image de D. en lui et en son prochain, ce qui l’empêchera de fauter, et « colporter des médisances est une faute qui crie au ciel » (Arach’in 15b), comme il est écrit: « Leur bouche s’attaque au ciel, leur langue traîne à terre » (Téhilim 73:9). « La médisance est une faute aussi grave que les trois crimes les plus graves, l’idolâtrie, l’immoralité sexuelle, et le meurtre, et elle est beaucoup plus néfaste » (Arach’in 15b). Mais si l’on est sensible à l’image de D. qui est en notre prochain, on ne médira plus à son sujet, et il n’y aura ni jalousie, ni haine, ni concurrence entre les hommes, car finalement, quel bénéfice pouvons-nous tirer de la Torah, de notre intelligence, ou même de nos bonnes actions, si nous perdons de vue l’essentiel, qui est de réaliser « C’est l’Eternel que je crains » (Béréshit 42:18), en tout lieu et à tout moment? Il faut respecter son prochain et veiller à son honneur comme au sien propre, puisque la Présence de D. réside sur lui à tout moment.

 

 

Article précédent
Table de matière
Paracha suivante

 

Hevrat Pinto • 32, rue du Plateau 75019 Paris - FRANCE • Tél. : +331 42 08 25 40 • Fax : +331 42 06 00 33 • © 2015 • Webmaster : Hanania Soussan