Avancer dans la Torah avec une force toujours croissante

Commentant le verset du Prophète: «Je passai auprès de toi, Je te vis t’agiter dans tes sangs, et Je te dis: Vis dans tes sangs...» (Ezechiel 16:6). Nos Sages expliquent que, voyant que les enfants d’Israël n’avaient pas de mitsvoth dignes de les libérer d’Egypte, le Saint, béni soit-Il, leur en prescrivit deux: le sang de la circoncision, et celui du sacrifice de Pessa’h (Chémoth Rabah 17:3; Mékhilta, Exode 12:6).

Une remarque évidente s’impose: comme nous l’avons vu à plusieurs reprises, les enfants d’Israël ont respecté des préceptes divins en Egypte, dont les trois fondements mêmes du judaïsme (ils ne changèrent ni leur nom, ni leur langage, ni leurs costume; Vayikra Rabah 32:5, Pirké deRabbi Eliézer 48) qui leur attirèrent d’ailleurs les sarcasmes des Egyptiens et de dures épreuves. Ces mitsvoth ne suffisaient-elles pas à les libérer de l’asservissement? Avaient-ils vraiment besoin des mitsvoth particulières de Pessa’h et de la circoncision?

C’est que, s’ils avaient réussi à observer les trois mitsvoth de base du Judaïsme, les enfants d’Israël étaient virtuellement en mesure d’en accomplir un grand nombre d’autres... Pourquoi à l’instar de la tribu de Lévi, ne s’adonnèrent-ils pas eux-aussi à l’étude de la Torah?

Nous voyons ainsi que celui qui est capable «d’avancer avec une force toujours croissante» (Psaumes 84:8) et s’en abstient, est sévèrement châtié... Certes, son mérite est grand, mais il doit constamment aspirer à des niveaux de plus en plus élevés... Seule l’étude assidue de la Torah fait «sentir et voir combien l’Eternel est bon» (cf. Psaumes 34:9) et nous incite à la poursuite constante de l’étude.

C’est qu’il n’y a pas de limites à l’amélioration des vertus et des beaux traits de caractère... Il est vrai que la situation des enfants d’Israël ne leur permettait pas d’étudier davantage la Torah ni d’accomplir des mitsvoth supplémentaires, mais de peur que ces préceptes précités ne soient pas considérés comme faits par habitude, comme il est écrit: «que la crainte qu’on a de Moi ne soit pas qu’un précepte de tradition» (Isaïe 29:13), l’Eternel leur a ajouté deux mitsvoth fondamentales: la circoncision grâce à laquelle l’homme accède à la perfection, comme il est écrit: «Conduis-toi à Mon gré et sois parfait» (Genèse 17:1). Rappelons qu’Avraham ne porta le titre de «parfait» qu’après sa circoncision (Nédarim 31b). Le brith élimine les forces du mal, et équivaut numériquement (plus 1 pour le collel) aux six cent treize mitsvoth de la Torah (cf.id. 32a), et sans le signe de l’Alliance, le monde n’aurait pas subsisté (id.). Dieu leur a ordonné également la mitsvah du sacrifice de Pessa’h, au cours de laquelle les enfants d’Israël ont par ailleurs fait preuve d’un dévouement exemplaire, en offrant l’agneau, divinité qu’adoraient les Egyptiens (Chémoth Rabah 16:3). C’est le précepte qui les a aidés à accomplir tous les autres, sans lesquels ils n’auraient pas été libérés d’Egypte.

Nos saints Patriarches, avaient observé toute la Torah, Ecrite et Orale (ainsi que les prescriptions rabbiniques), avant qu’elle ne fût donnée au Peuple d’Israël (Yoma 28b; Vayikra Rabah 2:8-9), et l’ont transmise à leur descendance. Même en Egypte, ils étudiaient dans une Yéchivah, ce qui leur permettait d’accomplir à la perfection toutes les mitsvoth...

Celui qui n’enrichit pas ses connaissances, et ne met pas son potentiel en pratique, finira par tomber dans les filets tendus par le mauvais penchant; il s’expose ainsi aux dangers les plus graves... C’est ainsi que lorsque les enfants de Jacob vinrent en terre de Canaan lui annoncer «que Joseph vivait encore et qu’il commandait tout le pays d’Egypte» (Genèse 45:26), son cœur se figea, parce qu’il ne les croyait pas. Mais quand «il vit par la suite les voitures (’AGaLoth) que Joseph avait envoyées pour l’emmener, la vie revint au cœur de Jacob leur père» (id. 27). Pourquoi? Parce que Joseph lui rappelait par là qu’avant de se séparer, ils étudiaient ensemble les lois de la génisse (’EGLah) décapitée (Béréchith Rabah 94:3, 95:3; Tan’houmah Vayigach 11): il n’avait pas oublié ce qu’il avait appris; bien qu’il n’eût ni livres, ni compagnon d’étude, ni maître, il y revenait constamment et était resté un Juste (Yalkhout Mé’am Lo’ez, id.). Jacob s’en réjouit. Ce n’est donc qu’après avoir appris que Joseph persévérait dans l’étude de la Torah, que Jacob «revécut». C’est ainsi qu’agissaient nos ancêtres: même dans les occasions heureuses, ils ne se concentraient que dans le service divin. Nous voyons ainsi par exemple que, lorsque Jacob revit son fils après tant d’années d’absence, il ne se jeta pas à son cou, mais récita le Chéma’ (Midrach Hagadah, Genèse 46:29). Faisant fi de ses sentiments de père à l’égard de son fils, il ne pensait qu’à servir Dieu.

Donc, quand on lui annonça que Joseph était vivant et qu’il commandait toute l’Egypte, Jacob comprit qu’il était aussi intègre qu’avant son départ, et qu’il avait maîtrisé son mauvais penchant (Bava Bathra 78b) dans le pays de l’immoralité et de l’impureté les plus parfaites (Chémoth Rabah 12:5; 1:22). Tout cela, il le devait à son étude intense de la Torah — la meilleure arme contre le mauvais penchant (Soucah 52b; Kidouchine 30b). Jacob comprit également que Joseph se rappelait son étude et accomplissait ainsi certainement à la perfection toutes les mitsvoth de la Torah, et cela le combla de joie.

«Et Jacob dit: «Rav (c’est trop!), ‘od Yossef ‘haï! (mon fils Joseph vit encore!)» (Genèse 45:28). Il se réjouissait que son fils vive dans la pureté et la sainteté, avance constamment dans l’étude de la Torah et l’accomplissement des mitsvoth, ce qui lui avait permis d’éliminer les forces de l’impureté. Le verset peut aussi se lire: «Rav ‘od Yossef (beaucoup, encore, on rajoute) ‘Haï (la vie)» (ibid.): Il multiplia sa vitalité dans l’étude de la Torah qui est appelée vie (Avoth deRabbi Nathan 34:10). Car sans vie et sans ajouter à la Torah qu’on étudie, on ne peut subsister dans la pureté et la sainteté. L’homme doit donc étudier sans relâche et n’aspirer qu’à accéder à des niveaux sublimes: toute interruption est susceptible de le conduire à la chute, qui peut conduire elle-même à la négation de l’existence de Dieu.

A propos d’Ismaël, le verset (Genèse 25:17) dit: «il défaillit et mourut et rejoignit (vayéassef) ses pères.» Ce sont là les caractéristiques de la mort des Justes (Bava Bathra 16b). Que signifie exactement Vayéassef? On sait que les Tsadikim ainsi que les Sages de la Torah, ne connaissent de repos ni dans ce monde-ci, ni dans le monde futur (Bérakhoth 64a; Béréchith Rabah 84:3). Dans ce monde, ils œuvrent inlassablement à l’étude de la Torah et à l’accomplissement de préceptes divins. Dans le monde futur, «ils avancent avec une force toujours croissante» (Psaumes 84:8). Ils manifestent avec passion leur amour ardent à l’Eternel; leur âme se languit constamment et aspire à se fondre complètement en Lui. Si dans ce monde-ci, on ne peut pas accéder à tout, c’est dans le monde futur qu’on accède à la vie réelle et aux niveaux sublimes. Car, dit l’Eternel à Moïse: «Nul homme ne peut me voir [dans ce bas-monde] et vivre» (Exode 33:20).

Quand elle évoque la mort des grands Tsadikim, la Torah utilise le terme asséfah: le Juste, mossif (en fait toujours plus), il ne cesse un instant de s’élever dans l’étude de la Torah et la crainte du Ciel. Sa connaissance et son intelligence s’aiguisent sans cesse. C’est ainsi qu’il agit également après sa mort. Il est vrai que la Torah interdit d’«ajouter à ce que je vous prescris» (Deutéronome 4:2), mais il s’agit là seulement du raffinement constant de ses connaissances de la Torah à laquelle on n’ajoute rien. C’est ce que nous trouvons chez le Roi Salomon qui «fixa des limites et des anses à la Torah» (Chir Hachirim Rabah 1:8; voir ’Irouvin 21b). Nos Sages avaient par ailleurs recommandé de «faire une haie autour de la Loi» (Pirké Avoth 1:1)... Que le sort de ce Tsadik est donc heureux!

On considère que même celui qui revient en toute honnêteté et sincérité à Dieu, accède aux niveaux sublimes du grand Tsadik. Il lui est même supérieur, comme il est écrit: Les plus grands Tsadikim ne peuvent égaler ceux qui se repentent de leurs péchés (Bérakhoth 34b; Sanhédrine 99a).

Quelle est l’importance de cette hossafah? Le Talmud (Témourah 16a) rapporte qu’à la mort de Moïse, trois mille lois furent oubliées. Pourquoi? Parce que Yéhochoua’ ben Noun prolongea le deuil de son maître (cf. Yalkout Mé’am Lo’ez, fin du chapitre Bérakhah) et tarda à revenir apprendre la Torah aux enfants d’Israël. On ne peut pas dire que le serviteur de Moïse ait cessé complètement d’étudier (comme ce fut le cas pendant la bataille de Jéricho, selon l’enseignement de nos Sages (Méguilah 3a) à propos du verset: «C’est maintenant que je suis venu»), seulement, il était tellement affligé par la mort de son maître qu’il n’a pas ajouté et développé de nouvelles idées de la Torah, ce qui causa en lui un certain oubli. Il savait que l’affligé ne peut pas se concentrer dans l’étude de la Torah, et manquant de clarté dans son étude, il peut même être induit en erreur. Il savait aussi qu’on n’est exempt de cette étude que pendant les sept jours de deuil (Mo’ed Katan 21a; Choul’han Aroukh, Yoréh Dé’a 384:1). En effet, «les préceptes de l’Eternel sont droits, ils réjouissent le cœur» (Psaumes 19:9) (voir aussi Ta’anith 30a)... Tout le monde partagea le deuil de Yéhochoua’ tellement il était profond, et l’étude de la Torah fut en quelque sorte négligée, et c’est ainsi que trois mille lois furent oubliées.

Que l’Eternel nous imprègne constamment de l’amour de la Torah et nous aide à l’étudier sans relâche et à atteindre des sommets de plus en plus élevés. Amen.

 

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