La protection divine individuelle, fondement de la Torah et de la foi

Les Sages (Chabath 88b; Zohar II, 156b) enseignent: «Rabbi Yéhochoua’ ben Lévi dit: «Lorsque Moïse monta au Ciel, les anges dirent au Saint, béni soit-Il: «Maître de l’Univers, que fait le fils de la femme chez nous?» «Il est venu recevoir la Torah», leur répondit-Il. «Tu veux donner à l’homme de chair et de sang un trésor que Tu as gardé chez Toi neuf cent soixante-quatorze générations avant la création du Monde? Qu’est-ce que l’homme, pour que tu te souviennes de lui!» (Psaumes 8:5). «Eternel, notre Seigneur, que Ton nom est magnifique sur toute la terre! Ta Majesté (la Torah) s’élève au-dessus des cieux!» (id. 2) «Fournis-leur une réponse!» demanda le Saint, béni soit-Il, à Moïse. «Maître de l’univers! dit Moïse, j’ai peur qu’ils me brûlent de l’haleine de leur bouche!» «Saisis Mon Trône de Gloire et réponds-leur!» proposa l’Eternel... «Qu’y a-t-il écrit?» «Tu ne tueras point. Tu ne commettras point d’adultère. Tu ne déroberas point...» (Exode 20:13). «La jalousie s’exerce-t-elle sur vous? Le mauvais penchant vous habite-t-il?» [Les anges] louèrent alors l’Eternel, comme il est écrit: «Eternel, notre Seigneur! Que ton Nom est magnifique sur toute la terre» (Psaumes 10:10). Ils ne dirent pas: «Ta majesté s’élève au-dessus des cieux...»

Ce Midrach soulève au moins deux questions:

1) Comment peut-on parler de jalousie chez les anges? (Chabath 89a). Ces serviteurs constants du Roi qui peuvent Le contempler constamment n’éprouvent certainement pas de jalousie à l’égard de l’homme en chair et en os. Pourquoi se sont-ils donc tellement opposés au don de la Torah?

2) Comment peut-on concevoir que les anges puissent s’opposer à la volonté divine? Qui peut s’immiscer dans Ses actions. Comment peuvent-ils s’opposer au don de la Torah, et même avant cela, à la création d’Adam? (Sanhédrine 38b; Zohar III, 207b).

C’est qu’en vérité ce que visent les anges, c’est exclusivement la Gloire de Dieu et Sa Torah, car ils savaient que «les conceptions du cœur de l’homme sont mauvaises dès son enfance» (Genèse 8:21). Craignant que la Torah ne soit profanée, ils considéraient qu’il serait préférable qu’elle reste dans les cieux, et que les enfants d’Israël soient en mesure de croire en Dieu sans la Torah.

Rapportons à cet effet les propos édifiants du Rambam sur Avraham, père du peuple Juif (Hilkhoth ‘Akoum 1:3). «Tout jeune déjà, ce «géant» ne cessa, jour et nuit, de se demander: Comment cette roue (le monde) continue-t-elle à tourner sans qu’il y ait quelqu’un qui la fasse tourner? Elle ne peut assurément pas tourner toute seule. Dépourvu de maître et de guide, profondément ancré à Our Kasdim, au sein d’idolâtres insensés (Béréchith Rabah 39:18), il finit, par son observation intègre, par être fermement convaincu qu’il y a un seul Créateur à cette créature.» Il n’arriva à reconnaître Dieu et avoir foi en Lui que parce qu’il ressentait la manifestation divine dans les moindres détails de la création. Cette reconnaissance et cette foi, il commença à la propager partout, et ordonna à ses enfants de continuer à la propager à leur descendance, comme en témoigne Dieu à son égard: «Car je l’ai distingué pour qu’il prescrive à ses fils, et à sa maison après lui, d’observer la loi de l’Eternel, en pratiquant la vertu et la justice» (Genèse 18:19) tout au long des générations.

Avraham réussit à surmonter l’épreuve de Our Kasdim (Béréchith Rabah 39:18). Comme il croyait en la Providence Divine, il n’éprouvait aucune crainte, et c’est grâce à cette foi que Dieu l’épargna de la fournaise (Yalkout Chimoni, Exode 240). Sa foi ne fit alors que s’affermir... C’est ce qui arriva également aux enfants d’Israël qui craignèrent l’Eternel, crurent en Lui et en Moïse Son serviteur (Exode 14:31). C’est enfin cette «sensation» de manifestation divine qui rapprocha Yithro du peuple élu.

C’est pourquoi nous sommes tenus de nous souvenir toute notre vie du jour où nous sommes sortis d’Egypte (cf. Deutéronome 16:3): «Prends garde à toi, et veille attentivement sur toi tous les jours de ta vie, de peur que tu n’oublies les choses que tes yeux ont vues... souviens-toi du jour où tu te présentas devant l’Eternel ton Dieu à ‘Horev», nous prescrit la Torah (id. 4:9). En nous souvenant du don de la Torah, nous nous rappelons les mitsvoth qu’elle nous prescrit, <%-2>mais l’essentiel, c’est cette foi et ce sentiment de manifestation divine quotidienne<%0>: c’est eux qui nous conduisent à la foi véritable en l’Eternel; d’où la nécessité de se souvenir avant tout de la sortie d’Egypte.

C’est d’ailleurs, d’après le Yalkout Chimoni (Béchala’h 140), cette foi qui libéra les enfants d’Israël d’Egypte.

En réponse à l’affirmation des anges, selon laquelle le mauvais penchant est susceptible de souiller la Torah, Moïse leur expliqua que seule la Torah est en mesure de lui livrer bataille, qu’aussi longtemps qu’ils n’avaient pas reçu la Torah, ils pouvaient se mesurer contre lui par la foi et ce sentiment de manifestation divine. Maintenant que la Torah a été donnée, il faut la faire descendre ici-bas, pour les enfants d’Israël parce que le mauvais penchant s’efforce constamment de persuader l’homme de ne pas croire à ce que ses yeux voient.

C’est la Torah qui revivifie l’homme et suscite en lui ce sentiment de manifestation divine. Sans l’étude constante et assidue de la Torah, on accomplit toutes les mitsvoth sans concentration, sans enthousiasme, par simple routine. Le mauvais penchant ternit graduellement les sentiments de l’homme, qui finit par ne plus distinguer cette protection divine, et ne plus s’en émerveiller.

Nous avons personnellement entendu le récit d’un rav de Londres qui, sorti de la synagogue un Chabath, vit un magasin grand ouvert sur le fronteau duquel était fixée une belle mézouzah. Stupéfait, il se tint à la porte de longs moments en réfléchissant sur cette scène grotesque: comment un Juif qui croit en la protection divine sur ses affaires, peut-il se permettre de profaner publiquement le Chabath, et faire fi des commandements divins? Un Chabath en suivit un autre, et notre rav passait de moins en moins de temps à l’entrée du magasin du Juif. Il finit même par ne plus y penser: l’habitude avait terni ses sentiments... Quant au propriétaire du magasin, il s’était d’ores et déjà habitué au péché: ouvrir son magasin le Chabath lui semblait désormais permis (cf. Yoma 86b).

D’autres profanent le Chabath et les fêtes religieuses, mais veillent à allumer les lumières de ’Hanoucah, ce qui n’est qu’une mitsvah de nos rabbins... (Chabath 23a). Tout ce qu’on peut dire à cet effet, c’est que Dieu a décrété que la lumière des bougies de ’Hanoucah est tellement forte qu’elle suscite un certain sentiment chez ces demi-morts. Celui qui dort n’a pas conscience de ses propres mouvements et ce qui se passe autour de lui, car le sommeil représente la soixantième partie de la mort (Bérakhoth 57b; Zohar I, 169b).

Dans tout ce qu’on voit, on doit donc percevoir le doigt de Dieu... C’est grâce à cette foi que les enfants d’Israël ont été épargnés du royaume de l’impureté... Sans la crainte du Ciel, l’étude de la Torah, et l’accomplissement de mitsvoth, il serait difficile à l’homme d’être convaincu que tout vient de la Providence Divine.

Il convient cependant de «lever les yeux en haut et regarder qui a créé ces choses» (Isaïe 40:26), comme le fit notre ancêtre Avraham (Béréchith Rabah 39a; Yalkout Chimoni, Genèse 62). Celui qui s’en abstient, agit comme un perroquet qui ne fait que répéter ce qu’il a entendu de son maître, mais ne ressent personnellement rien. Car ces paroles ne sortent pas de son cœur. Or, comme l’enseigne le Talmud (Bérakhoth 6b): «Les paroles de celui qui craint Dieu se font entendre, les paroles qui sortent du cœur pénètrent dans le cœur» (voir aussi Chirath Israël de Rabbi Moché Ibn Ezra, p. 156), car elles en sont sorties avec concentration et sentiment.

On peut à ce stade répondre à la question que se pose l’auteur de Darkhé Moussar sur le verset «Or Moïse était plus humble qu’aucun homme sur la face de la terre» (Nombres 12:3). Comment peut-on concevoir qu’un homme d’une telle envergure, maître de tous les prophètes (Vayikra Rabah 1:15; Esther Rabah, Introd. 10) ait pu être plus humble que tous!

C’est qu’en dépit de sa grandeur et de sa proximité avec l’Eternel, Moïse se sentait proche de la terre et resta humble, asservi à son âme...

Ainsi, si le Chabath n’a pas été donné aux nations, comme il est écrit: «Ce sera entre moi et les enfants d’Israël un signe qui devra durer à perpétuité» (Exode 31:17), c’est qu’elles ne sont pas animées d’une âme vivante: elles ne sont pas plus intelligentes que la bête. Par conséquent, le Chabath, au cours duquel on ressent la manifestation divine, ne leur a pas été donné (voir Betsah 16a).

Il convient par conséquent de s’efforcer de ressentir l’existence divine aussi longtemps qu’on est plein de vigueur. On raconte à cet effet qu’à ceux qui s’inquiétaient de son état de santé, Rabbi Israël Salanter répondait: «Vous n’avez pas à vous préoccuper des affaires de ce monde. Veillez plutôt à amasser le plus de mitsvoth pour le monde futur, où vous vivrez éternellement!»

Citant le verset : «Ses frères ne purent lui répondre, car ils étaient consternés devant lui» (Genèse 45:3), le Midrach (Béréchith Rabah 93:10-11) commente: «Malheur à nous le Jour du Jugement! Malheur à nous le jour du châtiment! Si les frères de Joseph ne purent se présenter devant lui, qui représentait la plus jeune des tribus, un homme de chair et de sang, qui peut se présenter devant le Saint, béni soit-Il, le Juge Suprême! Oui après sa mort, chacun d’entre nous reconnaîtra l’existence de Dieu et se demandera: «Notre père est-il encore vivant? Et moi qui pensais qu’il n’y a ni juge ni jugement» (Vayikra Rabah 28a; Midrach Cho’her Tov, 47:6; Yérouchalmi, Kidouchine 4:1). Chacun de nous sera jugé, et qu’il ne s’attende pas à la miséricorde dans le monde futur. Toute notre argumentation sera dénuée de fondement, et nous serons obligés d’avouer toutes nos fautes, celles commises intentionnellement, les fautes commises envers notre prochain, etc. «Que ferons-nous au jour du châtiment et de la ruine qui du lointain fondra sur nous?» (Isaïe 10:3). Revenons donc à Lui «un jour avant notre mort» (c’est-à-dire chaque jour puisque ce jour est inconnu).

Nos Sages enseignent que l’Eternel n’a rien créé en vain (Chabath 77b; Zohar III, 107a). Pourquoi a-t-Il alors créé la Lumière cachée, si elle n’a aucune fonction? (’Haguigah 12a; Rachi id.). Pourquoi voyant que la lumière était bonne, la cacha-t-Il (Genèse 1:4) aux méchants pour qu’ils n’en profitent pas?

Dieu a caché cette lumière pour l’avenir. Les Tsadikim en jouissent même dans ce monde: c’est la lumière de la Torah, qui ne cesse jamais d’éclairer (Zohar I, 16a; 47a). Elle permet à celui qui étudie la Torah, de sentir la Providence Divine et d’intensifier son étude... Dommage pour ceux qui n’en jouissent pas dans ce monde et ne peuvent donc s’y habituer dans le monde futur! Sans cette lumière que le Saint, béni soit-Il, a fait descendre des cieux pour les enfants d’Israël, le monde ne peut pas subsister (Zohar II, 220b; Zohar ‘Hadach, Ruth 103b).

 

L’importance de la foi au Mont Sinaï
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