La mitsvah des bikourim brise la gourmandise et dissipe les passions

Les désirs de ce monde empêchent l’homme de servir son Créateur, et celui qui possède cent en veut deux cents (Kohéleth Rabah 1:34). En ordonnant au Juif d’offrir des prémices au Cohen à Jérusalem, la Torah vise à lui apprendre à briser ses désirs et à lui inculquer de bons traits grâce auxquels il peut se rattacher à Dieu, et à lui faire prendre conscience du fait que Celui qui aime l’argent n’est jamais rassasié d’argent (Ecclésiaste 5:9). En effet, malgré toute la peine et les efforts investis pour récolter les fruits de son verger, il brise sa gourmandise et cueille les prémices de ses fruits pour les offrir au Cohen à Jérusalem. Et malgré la joie débordante qu’il éprouve en admirant, pour la première fois de l’année, ses fruits grandir, il fait preuve d’humilité et les réserve pour Dieu.

C’est pourquoi, pour ne pas entretenir la moindre pensée étrangère, il dit au Saint, béni soit-Il: L’Araméen a fait perdre mon père/avi. Il L’implore de le sauver du mauvais penchant qui s’efforce de le détacher de Avi, son Père qui est au Ciel. Pour y accéder, il doit auparavant briser ses appétits dans le domaine de la nourriture.

Il se rappelle aussi notre patriarche Jacob qui s’est enrichi chez Lavan, comme il est écrit: Moi qui avec mon bâton avais passé ce Jourdain et qui à présent possède deux légions (Genèse 32:11), mais qui n’en a pas néanmoins oublié l’Eternel, son Dieu. La grande richesse ne lui a pas fait perdre la tête pour un instant, bien qu’il aimât ses possessions dans le seul but de servir Dieu (‘Houlin 91a).

On peut se demander pourquoi Dieu devait faire descendre du ciel la manne aux enfants d’Israël durant quarante ans. N’aurait-Il pas pu accomplir un miracle en leur faveur en faisant pousser dans le désert des plantes qui serviraient à leur nourriture? Pourquoi devait-Il leur faire descendre ce pain de délices, cette nouriture des anges, selon Rabbi Akiva, ce pain qui d’après Rabbi Ychmaël restait dans leur deux cent quarante-huit membres de sorte qu’ils n’avaient pas besoin de se dégager? (Yoma 75b). La manne avait certes tous les go-ts du monde, mais les enfants d’Israël s’en sont plaints auprès de Dieu. Pourquoi Dieu ne leur a-t-Il pas fait pousser du blé normal?

Commentant le verset: Tous eurent à manger de ce pain de délices (Psaumes 78:25), nos Sages expliquent (Yoma 85a) qu’il s’agit du pain que mangeaient les anges, comme nous l’avons vu plus haut. Quand Moïse se trouvait au Ciel et revêtait l’aspect d’un ange, il en mangeait comme eux... Mais ne sait-on pas que les anges ne mangent ni ne boivent?

C’est qu’il y a une différence entre la manne céleste et la manne terrestre. Quand la manne descend du Ciel, elle se transforme en nourriture comestible, contrairement à celle qui se trouve dans le Ciel. Son go-t et son odeur sont d’ordre spirituel. C’est cette odeur qui a fait vivre Moïse durant son séjour de quarante jours et quarante nuits dans le Ciel. Comme on le sait, Moïse portait aussi le nom de Ich, comme il est écrit: puisque cet homme/ich, Moïse (Exode 32:1); Or, cet homme/ich Moïse... (Nombres 12:3); Moïse, l’homme/ich de Dieu (Deutéronome 33:1); Moïse se confesse aux enfants d’Israël... LO Akhalti ne mangeant pas de pain, ne buvant point d’eau... (id. 9:9). Le pain qu’il a mangé dans le Ciel, c’est lé’hem abirim (dont les initiales sont LO), le pain des délices. Comme nous l’avons vu plus haut, une fois descendue sur terre, cette manne se transformait en nourriture matérielle qui avait tous les go-ts du monde, mais elle restait spirituelle, dans le sens qu’elle imprégnait entièrement les deux cent quarante-huit membres du corps des Enfants d’Israël.

Le Midrach enseigne que la Torah n’a été donnée qu’à ceux qui consommaient de la manne; eux seuls pouvaient lui donner différentes interprétations (Tan’houma, Béchala’h 20; Mékhilta, id. 17). La raison en est qu’ils l’ont reçue directement du Créateur de l’Univers et qu’ils ont entendu la voix qui leur parlait. Sans la manne, cette nourriture céleste qui les faisait vivre au plan spirituel, ils n’auraient pas pu survivre par crainte de Dieu. Comme la Torah descendait du Ciel, les enfants d’Israël devaient purifier et sanctifier leur corps et le rendre apte à la recevoir, et ceci n’était possible que par la consommation de la manne, qui les empêchait de devenir matériels.

Sans briser les appétits inhérents à la nourriture, on ne peut en aucune façon recevoir la Torah. Mais comme ce monde est celui des épreuves, les enfants d’Israël ne devaient consommer que le côté spirituel de la manne (même si elle avait tous les go-ts que l’on désirait), délice céleste suprême.

Rabbi ‘Hanina ben Dossa a bien surmonté cette épreuve, lui qui ne vivait que d’une mesure de caroube d’un Chabath à l’autre, et grâce auquel le monde subsistait (cf. Bérakhoth 17b). Véhaya/Quand tu seras arrivé dans le pays Véhaya indique la joie: que les délices de ce monde ne contribuent pas à développer tes appétits; veille plutôt à les briser complètement et à t’élever dans l’étude de la Torah et le culte divin.

 

 

La vertu des prémices. L’héritage du pays. L’attachement au Tsadik
TABLE DE MATIERE
Le don offert aux Tsadikim l’offrande des prémices

 

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